Un interné de l'hôpital psychiatrique en cavale

MIRECOURT AUX ABOIS : UN INTERNÉ DE L’HÔPITAL PSYCHIATRIQUE EN CAVALE

Peur sur la ville : dans une cavalcade intempestive, un bataillon de forces de l’ordre part à la recherche d’un évadé de l’hôpital spécialisé de Ravenel, un « établissement de référence où la qualité de la prise en charge est la priorité », assurant les soins en santé mentale pour toute la population du département. C’est le dernier fait divers cocasse qui dénoue les langues à Mirecourt. Ce 22 Août, la Cité des Violons est sortie de sa léthargie dans un bruyant capharnaüm sur fond de course poursuite à la recherche d’un jeune homme de seize ans. Il s’était fait la malle avec maestria pour retrouver la liberté, loin des blouses blanches et des murs glauques de l’univers psychiatrique, loin des cris gutturaux déchirant les silences sordides, loin des distributions rituelles de médicaments.

D’abord écroué lors de l’application d’une mesure de garde à vue, il fut orienté vers des soins en psychiatrie par le médecin qui l’a ausculté, et transféré suivant la procédure à Ravenel. Le patient venait d’arriver dans cette infrastructure hospitalière qui pèse de tout son poids sur le bassin d’emploi de l’Ouest vosgien. Sur place, le mineur avait été placé au sein de l’unité principale d’accueil, ce lieu où les nouveaux patients transitent avant d’être dirigés vers « l’unité sectorielle » qui correspond à leur pathologie.

Ce samedi-là peu avant 17h, au centre hospitalier de Ravenel, le gaillard n’a pas fait dans la dentelle pour détourner l’attention de ses geôliers. Même si la direction de l’hôpital spécialisé se refuse à tout commentaire au sujet des circonstances précises de l’évasion, le verdict tombe comme une évidence indiscutable : l’adolescent a rusé, dans un tour de passe-passe digne d’un polar à la Fred Vargas, il s’est emparé de la clé des champs pour détaler vers la sortie de l’hôpital psychiatrique, fuyant à toutes jambes dans la pampa vosgienne, collant à ses trousses une horde d’uniformes bleus, policiers et gendarmes sur les dents jusqu’au lendemain matin au cours d’une cavalcade effrénée.

On ne plaisante avec la folie. Pendant plusieurs heures, un hélicoptère de la gendarmerie envoyé par la base de Nancy ratisse la ville de Mirecourt, balayant tout le secteur avec la précision d’un chasseur alpin. Son moteur assourdissant s’approche des toits de la ville, vrombissant jusque dans la tête des mirecurtiens déconcertés qui se mettent ahuris à leurs fenêtres. Ses pales font de l’ombre au sol dans les rayons dardés du soleil encore cuisant de cette fin d’après-midi, comme un éventail géant dans la période la plus chaude de l’année … Ayant éclusé son autonomie de carburant, l’hélicoptère retourne à sa base nancéienne pour répondre à d’autres opérations, tandis qu’un important dispositif est déployé sur le plancher des vaches depuis le début des opérations pour mettre la main sur le fugitif. On transpire dans les uniformes et on ne rigole pas. Sur le qui-vive et tout de sang-froid, le capitaine Gobert, commandant en second de la compagnie de Neufchâteau, dirige les opérations de collaboration entre plusieurs unités : l’équipe cynophile où évolue étroitement une formation de gendarmes aguerris, augmentée du maître-chien et de son Berger Belge, un Malinois spécialisé dans la recherche olfactive pour pister à l’odeur la personne en fuite. Cette équipe spécialement dépêchée sur place se doit de coopérer, pour accomplir l’ordre de mission, avec pas moins de trois patrouilles en provenance de Vittel, Bulgnéville et Mirecourt, police municipale en renfort, toutes mobilisées pour retrouver le disparu. Une vingtaine de personnes issues des forces territoriales compétentes a donc collaboré pour accomplir l’ordre de mission, depuis 17h ce samedi jusque tard dans la nuit, effectuant un quadrillage méticuleux du territoire, de fourrés en vergers, de haies broussailleuses en jardins privatifs. Alors que le dispositif de gendarmerie se déployait sur tout le bassin mirecurtien, des informateurs potentiels étaient mis au parfum, et les recherches se poursuivaient jusque tard dans la nuit.

Le lendemain à trois kilomètres de l’hôpital psychiatrique, peu avant 8 heures du matin, plusieurs signalements à la gendarmerie se recoupent aux alentours de Ramecourt. Ils mentionnent un jeune homme en pyjama d’hôpital, errant seul au village dans sa tenue d’interné. Dans les minutes suivantes, l’adolescent était appréhendé avec la plus grande efficacité par les forces de l’ordre vosgiennes. Son état de santé ne permettait pas une audition sur le moment. « Rien à dire » du côté de l’hôpital, « puisque tout est rentré dans l’ordre » nous informe laconiquement la responsable du site. A la question de savoir si le jeune homme représentait un danger pour la population, le groupement de gendarmerie à Épinal nous concède que l’individu « n’est pas actuellement en capacité de vivre en dehors de l’hôpital psychiatrique. »

**Marie-Pascale Gaudé- L’Écho des Vosges. **